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Rebelles et marronnes : quand la voix des femmes se fait entendre

Article publié le 22 septembre 2017 par France-Antilles.

Dans le cadre des commémorations de Septembre 1870, la plus grande insurrection du sud de notre histoire martiniquaise, l’association Culture Égalité a proposé un très beau spectacle à la centaine de spectateurs qui a répondu à son invitation à la Salle Lumina-Sophie.

Intitulé « Rebelles et marronnes » , ce spectacle, écrit à 6 mains et d’une seule voix par Hughette Belmar, Claudia Lecurieux et Georges Arnaud avec le conseil historique de Gilbert Pago, a conquis le public. « Rebelles et marronnes » s’appuie sur un vibrant hommage à plusieurs figures féminines de la Caraïbe, des oubliées des livres d’histoire alors que leurs vies, leurs combats mériteraient des pages et des pages. Ces femmes dont le nom est : Anacoana, Surprise, Lumina Sophie, Harriet Tubman, Flore Gaillard, Queen Nanny et Marie-Jeanne Lamartinière sont toutes des femmes militantes et actrices de l’histoire de leur pays : Haïti, Sainte-Lucie, la Guadeloupe, la Jamaïque, les États-Unis et la Martinique. Ce spectacle théâtralisé mis en scène par Éric Delor comble ce silence irrespectueux et déshonorant pour ces femmes qui par leur courage, leur bravoure, audace, ingéniosité ont bravé les interdits, prenant la conque de lambis pour informer, soutenir leurs comparses masculins partis au combat, prenant les armes ou leur flambeau, soignant et nourrissant les plus faibles, se ralliant aux oppressés pour gagner une liberté perdue au nom du mercantilisme et de la philosophie raciste. Éric Delor se présente comme le porte-voix de ces femmes qui tout en relatant leur opposition farouche et puissante à la domination de l’homme par l’homme s’adressent à leurs descendants : nous, des hommes, des femmes et des enfants libres grâce à leurs luttes. Un beau message pour ne pas oublier la place des femmes, la place de la femme noire avant la Déclaration des Droits de l’Homme et bien sûr l’abolition de l’esclavage. Une place minimisée par les livres mais ô combien majeure dans les faits. Le rétablissement du nom, de la vie de ces femmes dont le visage parfois n’est pas connu apparaît comme une réparation, une justice. À chacun des portraits dressés, une page d’histoire et un parcours : celui de la femme noire à travers la Caraïbe, celui d’une femme combattante.

LA FEMME CARIBÉENNE : UNE FEMME REBELLE, NI PASSIVE NI SOUMISE

Considérée comme valeur nulle, violée, maltraitée par ses maîtres, la femme noire en terre colonisée est un objet. Aux yeux de ses compagnons d’infortune, elle symbolise une force et un allié indéniable. Le récit de la vie de ces femmes exceptionnelles le démontre, ambassadrices des autres femmes qui comme elles ont combattu sans être, toutefois, retenues par l’histoire. Durant l’esclavage, au côté du maître qui ne se méfie pas d’elle, elle reçoit les nouvelles d’ailleurs, entend les prochains faits et gestes de chacun. Elle sert d’éclaireuse, d’informatrice. Elle a saisi que son statut de « moins que rien » , est en fait un atout, sa force. Femme libre, affranchie, marronne et même esclave, elle prend part à la libération de celles et ceux qui sont, eux, encore, aux prises d’une domination inacceptable. Plus que tout autre, elle a saisi l’ignominie de la servitude, la douleur de la séparation d’avec ses enfants et agit pour améliorer le sort des siens. Elle ne se résigne pas, elle résiste avec ses moyens, à sa façon et en dépit des préjugés d’une supériorité masculine. Après l’abolition de l’esclavage, elle poursuit son combat pour le maintien de cette liberté si chèrement acquise et l’égalité des droits de tous.

LA FEMME CARIBÉENNE : UNE FEMME MARRONNE

Rappel judicieux, « Rebelles et marronnes » en est un, ces héroïnes noires ont farouchement combattu parfois au prix de leur vie, prenant les armes, servant de chef, insufflant l’énergie, embrasant les habitations. Marronner ne veut pas dire fuir, c’est renoncer à la perte de soi, de son identité, refuser la misère et la basse condition imposée par l’autre. Comme l’a rappelé un personnage, c’est durant le marronnage que la tradition des rimèd razié a pris toute sa valeur, permettant une survie aux esclaves ayant fui leurs chaînes. Personnage fort mais aussi important que les autres, Lumina Sophie, la « Flamme de la Révolte » martiniquaise, présentée au tribunal comme une femme voulant dominer les hommes, emprisonnée au bagne en raison de sa participation à l’Insurrection est une des femmes mises en valeur par l’exposition proposée en parallèle du spectacle. Son histoire est aujourd’hui connue et reconnue. Son nom a résonné dans cet espace qui porte son nom.

REBELLES ET MARRONNES, UN OUTIL PATRIMONIAL SINGULIER

« Ce spectacle présenté alors que se déroulent les Journées du Patrimoine s’inscrit comme une action matrimoniale (qui rend hommage aux legs de la mère, de la femme) » , a souligné George Arnaud. Il était présenté pour la 4e fois et a été perçu comme tel, comme un beau cadeau par l’ensemble du public présent. Une belle motivation pour continuer à diffuser l’histoire de ces femmes caribéennes et leur message « Ne jamais renoncer à la, sa liberté! » , a déclaré le metteur en scène. Joué par des comédiens amateurs et talentueux «Rebelles et marronnes » est un spectacle vivifiant et enrichissant qui ne se raconte pas mais se vit!

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